Puisque nous en sommes à nos photos de communiants ( on a vu Byrrh, chez
Jean-Pierre), le truc que l'on portait au bras gauche ce jour-là c'est le brassard de communiant, en tout cas
Vendôme semble déjà dissident, à moins que cela ne soit une fantaisie de l’intéressé. Pour moi, le costard fut fait sur mesure par un marchand de vêtements de la rue Vaugirard dont l'enseigne était
Albany. Ce n'est que mon 2ème costard qui fut fait, lui-aussi, par un ' petit tailleur juif polonais" de la rue Lecourbe. Ce brave homme, petit par la taille, était le père d'un copain d'école, il s'appelait à ce moment-là, Samuel Spitalic, mais il était né Szmil Szpitalnik en 1914 à Varsovie. Son épouse m’invitait parfois à partager leur repas, le jeudi, avec leur fiston ( on devait manger cachère, je pense) mais c’était convivial et, avec le fils, on se tapait à 4 heures des tartines de pain azyme avec de la confiture pendant la Pâque Juive ( je sais pas si c’était bien « « orthodoxe » ).Evidemment, il savait que ma mère était polonaise et catholique et de temps en temps celle-ci poussait la porte de sa boutique pour discuter le bout de gras en polonais, ce qui devait leur rappeler des souvenirs à tous les deux. De même, le dimanche quand je faisais les courses avec mon père dans cette rue commerçante qui grouillaient de marchandes des 4 saisons, on s’arrêtait et ils discutaient ensemble, entre gens de la même génération. Mon copain d’école se rappelait surtout les goûters que faisait ma mère, et lui parlait aussi de la Pologne de son père.
Pourquoi, je raconte cela, c’est que Samuel Spitalic était un rescapé de Mathausen et il n’hésitait pas à me montrer son numéro d’immatriculation tatoué sur son bras , lui rappelant à chaque instant les camps de concentrations et leurs horreurs. Il en était sorti vivant.
Il fut tué un bon jour de 1964, par un truand qui en voulait à la caisse de son magasin, et qui s’enfuit aussitôt. Se voyant rattrapé, il s’engouffra dans une rue en impasse et se donna la mort. Triste fin pour le « petit tailleur juif « qui avait échappé aux camps de la mort, pour finir sa vie ainsi d’une façon aussi tragique qu’ inattendue, quant à l'autre taré...
C’est le costard sur mesure de
Vendôme pour sa communion qui m’a rappelé tout ça, alors retournons à la communion, en passant par le souvenir de l’autre photo et de la casquette des gars de St-Nicolas qui est un internat situé à Issy-les-Moulineaux, juste derrière la porte de Versailles et je passais souvent devant, vu que c’était dans notre zone de ballade, pas trop loin de chez moi. Et c’était les frères des Ecoles Chrétiennes qui géraient le truc, comme ceux que j’ai eu entre la 6ème et la 3ème, 4 stations de métro plus loin.
Alors la communion à mézigue la-dedans ? On y arrive et je joins la photo qui va bien avec, pour le même prix. On remarque qu’il y a ma frangine sur la photo, et comme on n’est pas jumeau, comment se fait-il que nous soyons ensemble, vu que l’on a 14 mois de différence ? La logique voudrait donc que nous ayons fait cette communion à un an d’intervalle. C’est bien ce qui était prévu au départ, sauf que…
Je faisais mon catéchisme dans une petite sous-paroisse où il n’y avait que des gars, les filles c’était plus loin et ce sont des bonnes sœurs qui s’occupaient de cela. On est en plein XVème arrondissement. Tranquillement cela se passait sur 3 ans . Les enseignements avaient lieu certains soirs après l’école et étaient dispensés par une vieille cheftaine scoute, vielle fille et acariâtre. Un soir, je zappe l’heure du cours et j’arrive en retard, puisque j’étais d’abord rentré à la maison avant de m’apercevoir de l’erreur. Je cours, j’arrive essoufflé, dis que j’ai complètement oublié de venir, pensant que faute avouée est à moitié pardonnée, la réponse fut une énorme mandale en travers de la tronche par la charmante scoutesse toujours prête. Et demi-tour direction maison.
Mon père décida en premier lieu que je n’y retournerai pas, et que je ne ferais pas ma première communion, non s’en avoir auparavant secouer les prunes du curé et celles de la cheftaine, si je puis m’exprimer ainsi.
Ma mère insista pour que je la fasse quand même, cette communion. Pour cela il fallu que mon père aille trouver le curé d’une autre paroisse, qui n’était pas sur le territoire rattaché au domicile. Par chance, c’était celui de la frangine. Mon père exigea alors que l’ on fasse notre communion ensemble, tant qu’à faire. C’était ça ou aucun des deux ne la fera, dit-il au curé qui fit la gueule, mais accepta.
Ce qui fit que je sautais la dernière année de caté et que je fis ma communion avec la frangine. Belle aubaine.
C’était la dernière année où la communion pour les gars se passait en costard ( croisé ou pas d’ailleurs) et avec le fameux brassard. C’est pourquoi je ne suis pas en aube de communiant, l’année d’après j’y aurais eu droit ( comme
Zoska qui nous l’a montré sur une autre photo).
Les filles c’étaient pareil. C’est pourquoi, la frangine porte sur elle la robe de communion prêtée par la cousine de mon père, qu’elle avait dû porter quelques 30 ans auparavant et qui sentait bon la naphtaline, était retro-vintage de ce charme désuet d’avant-guerre et d’années folles et qu’il ne fallait pas être dégonflée pour porter ce truc-là, et surtout prendre sur soi quand on a 11 ou 12 ans !
Et moi la dedans ? D’accord j’avais le costard, mais quand on a un an de moins et qu’on porte le costume avec grâce et élégance comme moi avec le nœud pap qui va bien, tu te demandes ce que tu fais avec ça sur le dos et comme le gars est bien rondouillard en plus, le tableau est complet.
Alors la particularité, c’est le brassard. En fait ce n’est pas le mien et c’est çà qui fait que c’est pas pareil et que cela n’a pas la même valeur au niveau du souvenir. C’est celui qu’avait prêté aussi la mère d’un copain qui à l’époque n’était qu’un copain, qui comme moi avait un père français, qui fut prisonnier de guerre et se maria avec une déportée du travail polonaise, en Allemagne dès la fin du conflit, comme mes parents. On ne savait pas encore que ce sur-doué deviendrait écrivain-journaliste, rédacteur en chef de TF1, présentateur TV, éditeur, spécialiste en littérature polonaise et de Jean-Paul II. Il est, hélas décédé, il s’appelait
Jean Offredo.
C’est marrant comment à partir de quelques photos et souvenirs , on peut dire tant de trucs, mais on est dans le forum fait pour ça, Non ?